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2018 GRAND MILLESIME Au finish tropical

2018 GRAND MILLESIME Au finish tropical

RESUME

Ensoleillé, chaud et sec, de mi-juillet à fin octobre, 2018 en rouge et en blanc sec, comptera parmi les réussites de cette décennie.
Quelques aléas : violence généralisée du mildiou, grêle parfois, manque d’eau sur sols légers (graves, sables…), privent 2018 du qualificatif d’exceptionnel.
Sans présenter la puissance et la profondeur des millésimes 2005, 2010, ou même 2016, les rouges de 2018 offrent, à l’instar des 2015, des vins riches, généreux et séduisants dans l’immédiat à cause d’une acidité relativement basse.
L’assemblage merlot et cabernet franc sur les plus grands terroirs de la rive droite, donne l’impression de dominer le millésime, même si les plus grands cabernet sauvignon de la rive gauche tiennent leur rang, du moins à ce stade des dégustation Primeur.
Comme en 2017, le niveau qualitatif des blancs secs est remarquable. A noter que leur taux d’acidité relativement bas pourrait desservir le vieillissement des plus grands crus.
Les vins liquoreux issus d’une pourriture noble trop tardive, sont bons mais ne sauraient atteindre le niveau qualitatif des grands millésimes.

Ces avis relèvent de la dégustation Primeur du mois d’avril pour donner une approche globale de la qualité du millésime avec toutes les réserves d’usage relatives à cet exercice précoce. Pour en savoir plus  http://bordeauxclassicwine.fr/primeur.html

N B pour faire un commentaire voir à la fin de l'article

DEROULE DU MILLESIME

La pousse de la vigne démarre tardivement après un mois de mars froid et pluvieux. Les températures diurnes (+ 2°C/N*) estivales d’avril accélèrent la croissance, qui rattrape son retard.
Froid au début, mai se caractérise par une grande instabilité du climat avec de violentes averses et de la grêle le 20 en sud Gironde et le 26 dans le nord et l’Entre deux Mers.

Floraison rapide et homogène
La vigne fleurit du 28 mai au 10 juin dans les meilleures conditions, sans accidents notoires de coulure.
Le climat chaud (+ 1,5°C/N) et humide de juin provoque une attaque foudroyante de mildiou sur feuilles et sur grappes. La majorité des crus sont touchés ; certains ont tout perdu ou presque ! Particulièrement ceux en Bio/Biodynamie, qui n’utilisent que des produits à base de Cuivre et des préparations (végétales, minérales ou organiques), épandus en surface du végétal et lavés à la première pluie. A l’inverse, les pesticides de synthèse appliqués par les vignerons conventionnels circulent dans la sève (dits systémiques). De ce fait, ils offrent une action rémanente de plusieurs jours, même s’il pleut.

Véraison et maturation retardée
La première quinzaine de juillet connaît une pluviométrie abondante avec de nombreux orages et encore de la grêle les 4 et 15 juillet. Cet excès d’eau retarde la véraison (changement de couleur des baies). Le beau temps chaud, sec et ensoleillé qui qui débute mi-juillet convient à une véraison rapide et régulière. En août une grande sécheresse s’installe (- 70% / N) alors que la température moyenne dépasse la normale (+ 2°,4 /N), avec un ensoleillement optimum (+ 20%/N). La vigne sur les terroirs filtrants souffre, mais quelques orages salvateurs relancent la maturation.

Maturation complète et homogène
Le miracle du millésime tient à ces conditions tropicales qui perdurent en septembre :  chaud (+ 2°5/N) mais avec des nuits relativement fraîches, quasiment sans pluie alors que la normale est de 85 mm en moyenne et avec un ensoleillement record aussi (+ 35%/N). Ce scénario parfait induit une maturation lente et complète de tous les cépages et laisse aux vignerons le soin de les cueillir au meilleur moment. Ce qui n’avait pas été le cas en 2017 pour les cabernet-sauvignon tardifs dont on avait avancé la cueillette à cause de la pourriture grise envahissante. En 2018 au contraire l’état sanitaire des raisins est parfait.

Des vendanges idéales
Elles démarrent fin août pour les blancs secs et se prolongent sans encombre jusqu’à la mi-septembre.
Les raisins rouges profitent de l’été indien et sont cueillis dans des conditions climatiques exceptionnelles du 7 septembre à la mi-octobre pour les cépages les plus tardifs.
Ce climat idéal pour les blancs secs et les rouges, ne sourit pas aux vins liquoreux. Il faut attendre les tris d’octobre pour cueillir des raisins atteints par la pourriture noble (botrytisés). Une grande partie de la récolte relève de raisins passerillés (desséchés) , concentrés et mûrs.

LA QUALITE, LE STYLE ET L’AVENIR DES VINS

Les vins blancs secs
La réussite des trois cépages blancs et leur état sanitaire excellent, signent de grands blancs secs 2018. Les échantillons Primeur sont séduisants laissant émerger un sauvignon – cépage majoritaire – dans sa plus belle expression, loin, pour beaucoup de crus, des excès redoutables dont son arôme et son goût sont parfois l’objet. Les sémillons riches et denses complètent parfaitement l’assemblage. Seul hic, l’acidité relativement basse – à la différence des 2017 - qui pourrait handicaper l’avenir des plus grandes bouteilles.

Les vins rouges
Le mildiou, la grêle parfois et surtout la sécheresse autant que les fortes températures, ont réduit les volumes de récolte. Ce qui est un gage de richesse, de concentration des raisins mais aussi qui rend compte de l’hétérogénéité de la qualité générale. A cela on doit ajouter les niveaux assez bas de l’acidité ; c'est pourquoi le millésime 2018 n’est pas exceptionnel.
La dégustation des vins en Primeur laisse entrevoir une supériorité des sols calcaires (rive droite, Listrac, Saint-Estèphe) et des sols argileux (Pomerol et terroirs voisins) disposant d’une réserve d’eau suffisante pour lutter contre les effets de la sécheresse et de la chaleur.
Le merlot et le cabernet franc apparaissent comme les grands gagnants du millésime – certains sont exceptionnels – sans que cette supériorité soit aussi flagrante qu’en 2017. En effet les grands cabernet sauvignon du Médoc et de Pessac Léognan, offrent tous les prémices pour à terme enthousiasmer aussi les amateurs.
Sans avoir la prétention de millésimes exceptionnels comme 2010, 2005 ou 2016, 2018 trouve une parenté possible avec les séduisants 2015. Des vins de garde moyenne qui pourront se déguster avec bonheur d’ici 5 à 10 ans selon les crus.

Les vins blancs liquoreux
La pourriture noble, à la base de ces vins d’exception a manqué, tout comme l’acidité. Riches, concentrés, très purs, les vins se dégustent parfaitement mais n’offrent pas les caractères aromatiques et gustatifs des très grands millésimes. 2018 restera dans les annales comme un bon millésime pour les vins liquoreux.

*Moyenne de 1981 à 2010

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À propos

Franck Dubourdieu

Œnologue-Consultant, critique indépendant, bloggeur

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S
Très bel article, très intéressant et bien écrit. Je reviendrai me poser chez vous. N"hésitez pas à visiter mon univers (lien sur pseudo). A bientôt.
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