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Notation

Notation

Ma critique ne concerne que les vins en bouteille, depuis au moins deux ans pour les plus grands crus. Ainsi les millésimes récents (2011, 2012) ne sont pas encore notés. Les dégustations en primeur (voir la rubrique) me donnent un avis général sur le millésime mais pas sur les vins ; c’est trop tôt. Et pourtant les dégustateurs de la planète ne s’en tiennent souvent qu’à cette note !

L’échelle de notation repose sur une base d'évaluation large, partant de 68/100 pour un Bordeaux de base, juste convenable, pour atteindre la note 100 /100 accordée aux bouteilles de légende considérées comme modèles absolus.

J’ai pris le parti de ne publier que les notes égales ou supérieures à 84/100. Cette note représente, à mon avis, le seuil minimum de qualité pour qu'un vin (cru classé ou pas) puisse répondre aux exigences d'un amateur qui débouche une bouteille de vin de Bordeaux.

La note attribuée à un vin offre une image globale de sa qualité, qui intègre les deux paramètres fondamentaux : structure et finesse. Elle est le reflet d'un juste équilibre entre ces deux critères de qualité, sachant qu'à structure égale le degré de finesse fera la différence, ce en quoi je me rattache au courant « classique » de la dégustation.

  • La structure : volume, concentration, densité, longueur en bouche, rémanence (persistance) après bouche. Un critère nécessaire mais pas suffisant.
  • La finesse générale : de l’arôme, des saveurs (équilibre), de la flaveur* (finesse globale dont celle de la texture des tanins pour les rouges). Une présence de bois dans les premières années, selon sa nature et son intensité, fait baisser la note. Au bout de quelques années – trois ans et plus - elle est éliminatoire. Nombre de crus ne sont pas référencés, surtout à Saint-Emilion. Ces vins dits « modernes » proviennent de raisins en sur-maturité qui subissent souvent, une sur-extraction, un forçage nuisibles aux équilibres fondamentaux et de plus, cerise sur le gâteau, sont en général rongés par un excès de chêne neuf.
  • Le potentiel de vieillissement : la connaissance des millésimes antérieurs permet d’anticiper le potentiel de vieillissement, avec une réserve pour les blancs secs dont l’avenir est souvent imprévisible à cause de l’oxydation prématurée.

Les trois critères associés définissent la qualité globale de chaque cru et millésime. Ainsi les plus grands crus dans les millésimes réussis peuvent-ils dépasser 94 /100 voire atteindre 100/100 dans de rares cas exceptionnels.

Les vins des millésimes récents sont notés sur leur qualité intrinsèque mais aussi sur une projection de celle-ci dans l'avenir. L'histoire du cru et la connaissance de l'expression du terroir à travers les millésimes antérieurs aident à imaginer le vin lors de son plein épanouissement. Les dégustations ultérieures permettent de vérifier les évaluations initiales et, le cas échéant, de les modifier. Plus on s'approche de la période de maturité, plus le jugement est conforme à la qualité optimale et relativement stable du vin.

*flaveur =  sensation relative au vin dans la bouche qui associe les arômes et les saveurs (acide, sucré, salé, amer, umami ; les sensations mécaniques (consistance, la concentration, le  toucher buccal par le degré de finesse des tanins), physiques (la température).

 

INTERPRETATION DE L’ECHELLE DE QUALITE

Afin de donner un aperçu de l’échelle de qualité j’ai imaginé de façon un peu caricaturale la description d'un vin type, d’abord jeune puis à son apogée, pour trois niveaux de notation.

Les textes proposés à titre d'exemple donneront l'occasion de se familiariser avec le vocabulaire de la dégustation et de prendre conscience, pour chaque niveau de qualité, du plaisir que l'on peut éprouver.

 

Très bons 84 à 88

  • Vin jeune : belle couleur ; nez de fruits mûrs, parfois réservé ; en bouche du corps, du fruit pur, parfois des notes boisées de chêne bien dosé.  On note un équilibre des éléments, longueur, volume, finesse des tanins mûrs, concentration et élégance d'une noble origine. Vieillissement favorable : entre sept et 15 ans.
  • Vin à maturité : couleur bien présente, montrant une évolution des teintes ; bouquet délicat, raffiné, assez nourri ; en bouche, le fruit mûr s'est enrichi d'arômes variés, originaux et rares ; bonne persistance aromatique et gustative des tannins assouplis. L'ensemble s'est fondu dans un tout harmonieux et exprime tout le potentiel  pressenti dans sa jeunesse. Beaucoup d'agrément et de finesse qu'assigne son rang dans la hiérarchie.

Excellent 89 à 93

  • Vin jeune : couleur profonde, beaucoup de fruit, arômes discrets de chêne neuf ; à l'agitation, le parfum s'enrichit de senteurs plus fines, originales, fugaces. Puissance en bouche, de l'extrait, du volume, de la matière ; trame souple (merlot) ou plus serrée (cabernet) de tanins vigoureux et élégants, onctueux, longs ; le fruit rejoint le tanin juvénile et se prolonge. L'ensemble a de la classe, de la retenue, une réserve aristocratique de bon aloi. Son agrément d'aujourd'hui témoigne de la grande qualité de demain. On gravit une marche dans la hiérarchie, dans l'origine, dans l'aptitude à se bonifier. Espérance de vie : 10 à 25 ans.
  • Vin à maturité : couleur encore dense, d'un beau pourpre avec des reflets orangés signant l'évolution ; bouquet intense, séduisant, distingué. On y revient souvent, il évolue dans le verre, la palette des parfums s'élargit, des essences rares apparaissent. A l'extrait de fruit resté intact, se mêle un tanin suave devenu à la longue odorant. Les muqueuses palpent l'onctuosité, le « gras » qui donne volume, longueur et consistance souple. Le vin tapisse tout le palais de son tissu épais et raffiné, il dure. Cette élégance associée à ce temps de sensation démultiplie le plaisir. Le degré de satisfaction augmente. Un nouveau palier franchi témoigne de l'origine, plus noble encore, et peut-être de la très bonne qualité du millésime.

Exceptionnel 94 à 100

  • Vin jeune : toutes les dimensions augmentent (puissance, densité, longueur, persistance). Le vin a plus de volume et d'épaisseur. II a une morphologie faite pour le long terme. Parfum pur, discret, en rétention ; à l'agitation percent, tout au plus, quelques nuances déjà fondues et raffinées. Au goût, les tanins dominent sans écraser. Ils structurent l'ensemble, s'y intègrent et inclinent à une longévité de plusieurs décennies. Ferme, rigide, austère ou bien, selon un style opposé, souple, opulent, généreux, le vin dégage autant de force que de finesse. Il lui faut compter sur le temps pour atteindre son optimum, enrichir son bouquet et fondre l'ensemble de ses constituants. Il appartient à la race des seigneurs. Espérance de vie : de 20 à 50 ans et plus.
  • Vin à maturité: couleur pourpre foncé, sombre, profonde, impressionnante, aucun signe de faiblesse, présentation impériale. Le bouquet si riche, si fin échappe à la description. On y lit toute la race, la personnalité et la distinction de ce cru, de ce terroir incomparable, unique. Le vin se livre tout entier dans la chaleur des muqueuses, exhale ses senteurs diverses et ses essences rares imprègnent le palais - le bien nommé. Il tapisse la langue, les joues, la gorge, répand sa plénitude et se fond dans une harmonie subtile. Le vin s'attarde et persiste longtemps après qu'on l’a avalé. Il est savoureux et possède cette sublime légèreté nommée finesse. Une indicible perfection, la quintessence du goût. Cette classe supérieure est réservée à peu de crus. Principalement les premiers, les grands seconds, les assimilés et quelques autres dans les millésimes exceptionnels, dont un très long vieillissement révèlera la prééminence.

 

L’échelle de qualité proposée constitue une approche personnelle, un guide comparatif au service de l'amateur. Selon ses prédispositions et son expérience, il pourra y confronter ses jugements et, au fur et à mesure, affirmer son propre goût.

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À propos

Franck Dubourdieu

Œnologue-Consultant, critique indépendant, bloggeur